Revue de la montre mécanique Shanghai 7120
Introduction sur Shanghai et la 7120
L’industrie des montres est très fortement touchée par la contrefaçon et la copie. Les techniques de reproduction évoluent et il existe aujourd’hui un véritable marché autour des clones de modèles réputés ou recherchés. Certains n’hésitent d’ailleurs par à revendiquer la nature de leur produit, d’autres maquillent la vérité piégeant parfois l’acheteur innocent…
J’ai moi-même cédé à la tentation du faux, même si ce n’est pas directement ce que je recherchais à l’origine. Les montres présentées dans cette article n’ont pas complétement usurpé leur identité, elles ont plutôt profité du passé glorieux de leurs ancêtres.
Il s’agit de modèles « Shanghai 7120 », achetés l’un et l’autre sur le site d’enchères bien connu. Pour les deux montres, je n’ai dépensé que 45€, frais de port inclus.
Conçu dans les années 60 et réellement commercialisée en 1973, la 7120 s’est imposée rapidement comme une référence dans son pays. Destinée uniquement au marché chinois, elle représentait 3 à 4 mois de salaire d’un ouvrier et nécessitait des « coupons » spécifiques pour être achetée, obligation du gouvernement de l’époque.
Au cours de son exploitation jusque dans les années 1990, la 7120 a connu beaucoup de versions associant des looks et des calibres différents. Très qualitatif a ses origines, associant précision et fiabilité, sa qualité de fabrication a progressivement chutée jusqu’à l’arrêt de sa production. D’abord produite par l’une des premières usine d’horlogerie Chinoise, la « Shanghai Watch Factory », certains modèles ont été construits par la suite par d’autres usines moins importantes. Mais elle a toujours été associée à son entreprise de départ.
Le vintage connaissant cycliquement un regain d’intérêt pour les collectionneurs, le look de ces 7120 associé à ses bonnes réputations de conception, les ont vite rendues très attractives aux yeux de certains.
Seulement voilà, une 7120 d’origine, ça ne court par les rues, et rares sont les personnes possédant une véritable 7120 fonctionnelle à son poignet. C’est alors que le génie de la productivité chinoise est entrée en jeux avec l’apparition des « NOS », acronyme de « New Old Stock » ou « Nouveau Ancien Stock »J)
L’explication tiendrait dans le fait que de nombreuses pièces datant des heures de gloire de la 7120 aurait été récupérées par ci et là et permettraient à des personnes compétentes de proposer des montres flambant neuves à des prix dérisoires.
De mon côté, j’aurais tendance à rester méfiant sur ces explications. Si il est fort possible que la banqueroute de la « Shanghai Wath Factory » dans les années 90 ait laissée des stocks important de montres, je pense que de nombreuses 7120 actuelles du net ont été fabriquées de toutes pièces.
Découverte de la 7120
A mon humble avis, les deux montres que j’ai récupéré normalement issues du « NOS » sont en fait des produits de l’une ou l’autre des nombreuses chaines de montage de montres chinoises « génériques ».
Il n’en demeure pas moins qu’elles reprennent les codes esthétiques de la 7120 d’origine pour proposer un look totalement vintage.
Le boitier
Les deux boitiers sont légèrement différents dans leur forme, mais ils offrent tous deux un diamètre de 36mm pour une épaisseur de 12mm. L’acier retenu n’est clairement pas de première qualité, et la finition est ici réduite à son minimum.
Mais le polissage est tout de même suffisant pour donner l’illusion de montres classieuses et raffinées.
Le cadran
Le fond est d’une très grande sobriété, et d’un blanc nacre plutôt réussi. Il s’accorde parfaitement au minimalisme des formes des aiguilles, là aussi quelque peu différentes d’une montre à une autre, mais très simpliste sur les deux modèles. Malheureusement l’une de deux souffre d’une aiguille des minutes quelque peu pliée.
La trotteuse, très fine est pour moi la touche d’esthétiques la plus réussi, avec un petit point rouge rehaussant très légèrement le cadran.
La marque « Shanghai » existe toujours, la société ayant été rétablis en 1999, on retrouve son nom en calligraphie Chinoise. Le « china made » à 18H assure la provenance de l’objet.
Le remontoir est plus facilement manipulable sur l’une des deux montres, mais dans les deux cas il reprend le logo sur sa surface.
Les bracelets
Les bracelets soufflent le chaud et froid. La version Nylon étant catastrophique, la version « simili cuire » plutôt réussi. La version Nylon s’effiloche, et les œillets ne sont pas alignés. La version « Simili cuire » est agréable et les coutures semblent résistante.
Le dos des montres est aussi légèrement différent. Les inscriptions sont identiques, mais l’un des deux est légèrement plus rugueux au touché. Le mot « Shanghai Shoubiao Chang » est un équivalent à Shanghai Watch Factory
La mécanique de la 7120
Comme les 7120 d’origine, ces deux modèles sont équipés d’un calibre à remontage manuel. Il s’agit d’un « Chines Standard Movement » connu aussi sous le nom de « Tongji ». En fait, il s’agit d’un mouvement donc la conception date de 1969 et la mise en production de 1971.
Le gouvernement de l’époque souhaitait la mise en place d’un calibre commun à toutes les usines de montres chinoises. Il a servi de base à deux nombreuses variantes dont celle-ci, à 19 rubis (sans doute une référence SS7) et estampillé ZSH. Ces trois lettres indiquent la provenance du calibre, ici la « Shanghai Watch Factory », les autres usines ayant un trigramme associé différent. Sous le balancier, on trouve également deux lettres supplémentaires que je n’ai réussi à déchiffrer que sur un des deux modèles : KH. La première lettre indique l’année de production ou A=1974, il suffit de poursuivre crescendo pour arriver à K=1984. En théorie, il ne peut y’avoir de mouvements référencé au-delà de 0 correspondant à 1988 dernière année de production.
La seconde lettre indique le mois de production, ou A=Janvier et donc H=Aout. Donc dans mon cas, l’un des montres est équipée d’un calibre construit « normalement » en Aout 1984.
La finition des pièces est très « brutes », mais l’esthétisme n’était absolument pas une contrainte du cahier des charges d’origine.
Oscillant à 21 600 oscillations secondes pour une réserve de marche de 40H, la précision reste aléatoire : plutôt étonnamment bon sur l’une, plutôt catastrophique sur l’autre. Preuve en ai que ce calibre peut se montrer efficace pour peu qu’il soit correctement réglé. Le « Chines Standard Movement » est encor largement utilisé de nos jours et se retrouve dans de nombreux produits "low cost". Arborant des finitions souvent approximative, les sites d’enchères comme eBay regorgent de montres équipées de ce calibre. Certaines nouvelles références employées par des fabriquants chinois ne sont que des évolutions plus ou moins élaborés de ce dernier.
Mon avis sur la 7120 de Shanghai
Que penser de ces « vrai-fausse » 7120 ? Si le calibre employé semble d’origine, le boitier et autres éléments restant sont plutôt issus de production moderne, perdant de ce fait le niveau de finition et la qualité prêtée aux 7120 authentiques. Mais n’oublions pas qu’il s’agit de montre mécanique inférieur à 30€, et si l’on remet le prix en face du produit alors on est prêt à faire quelques concessions. Personnellement, j’aime l’histoire que ces montres évoquent, et leur look vintage les rendent très sympathiques. De plus, je cherche à ma lancer dans l’entretient et le réglage de mes toquantes. Dans ce contexte, j’aime autant me faire la main sur ces calibres « Tongji », facilement remplaçable à moindre frais. Au final ces deux petites « chinoiseries » peuvent devenir des montres agréables à porter et relativement fiables. Pour peu qu’on y fasse attention et qu’on prenne le temps de les régler convenablement. Et puis, en cherchant bien, on peut même les trouver à moins de 15€, mais faut prévoir d’en acheter plusieurs pour en concevoir une parfaitement fonctionnelle J
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